Sorti en version française en même temps que sa version allemande (merci Filosofia) à l'automne dernier, Maîtres Couturiers nous transporte au XVIIIème siècle sous Louis XIV en pleine période baroque. Les joueurs représentent des couturiers qui vont rivaliser pour proposer les plus belles robes aux nobles afin qu'ils puissent briller lors de soirées mondaines.

Derrière ce thème un peu hors du commun, se cache un jeu de gestion, avec un peu de pose d'ouvriers, de majorité et de deck-building.
A leur tour les joueurs sélectionnent les artisans avec lesquels ils réaliseront leurs actions. En fonction de leur expérience (Apprenti, Compagnon et Maître), ils n'auront pas accès à toutes les actions possibles. Globalement, il faudra recruter de nouveaux artisans, obtenir des ressources pour les robes (Soie, Laine, Dentelle), créer des tenues de bal, investir dans des embellissements du château qui rapporteront des points en fin de partie. Quand une tenue est réalisée, le joueur a le choix entre la vendre pour obtenir de l'argent (toujours utile dans ce jeu), ou la louer et la placer dans une salle de réception pour marquer des points en fin de partie (majorités). Ajoutez à cela quelques bonus divers inhérents à tout jeu de ce type, et vous obtenez un jeu de gestion fort agréable.

La lecture de la règle est simple et ne laisse place à aucune ambiguïté, c'est appréciable.
Les actions disponibles sont clairement identifiables et il y a même des aides de jeux sur le plateau pour rappeler aux joueurs ce qu'ils ne peuvent pas faire avec leurs apprentis par exemple.
Au niveau des mécanismes, même s'il n'y a rien de bien novateur, j'ai particulièrement apprécié les nombreux choix à faire. Ça commence dès le début du tour quand il faut sélectionner trois commis (en fonction de leur expérience mais aussi du bonus qu'ils octroient) en sachant que ceux qui ne sont pas choisis ce tour, devront l'être au prochain. Ça se poursuit bien entendu dans le choix des actions, et l'ordre dans lequel les réaliser (notamment par rapport à l'adversaire), sans parler de la question cruciale de l'argent : vous devrez régulièrement vendre vos robes pour vous donner les moyens de poursuivre votre développement. Mais cela se fait au détriment de points de victoire, ce qui n'est jamais facile.
La construction du deck, bien que simplifiée à l'extrême n'en est pas moins cruciale car elle définit en partie votre stratégie. Et puis il y a cette partie de recrutement des nouveaux commis qui ne peut être réalisée que par des Maîtres, tout comme la création des tenues les plus prestigieuses (et donc les plus chères et rapportant le plus de points de victoire). Ce qui ne manquera pas de vous mettre face à des choix difficiles.
Par conséquent, il sera parfois important de congédier vos commis pour accélérer son développement ultérieur. Si ce type de pratique est courante pour tout joueur de Dominion, elle n'en sera pas moins déroutante ici, car cela vous coûte une action précieuse (votre adversaire poursuit son développement pendant ce temps...).
Il existe heureusement plusieurs stratégies gagnantes, et bien évidemment c'est le joueur qui aura su être le plus opportuniste et qui se sera le mieux adapté qui l'emportera.

La rejouabilité du jeu est assurée par plusieurs facteurs : le hasard de la pioche des tenues et des ressources, et un astucieux système pour l'arrivée des nouveaux commis chaque tour. Même si deux parties ne se ressembleront jamais complètement les stratégies par contre ne change pas. Toutefois, les différences des nouveaux commis et le hasard des tenues inviteront les joueurs à s'adapter à chaque partie.

A deux joueurs, le jeu bénéficie de quelques adaptations bienvenues, notamment au niveau du plateau (l'éditeur a eu la bonne idée de faire une version recto-verso en fonction du nombre de joueurs). Et comme toujours pour ce type de jeu, le contrôle sera maximal, au détriment de l'interaction (il y en a quand même heureusement, notamment pour les majorités dans les salles de bal) et donc de la pression. Il en résulte des parties courtes (45 minutes), mais moins tendues qu'à 4 ou 5 joueurs. Un bon format pour découvrir le jeu, mais dont on se lassera plus vite (3 parties max ?).

Si Maîtres Couturiers n'est pas un jeu innovant (il n'en avait d'ailleurs pas la prétention), il n'en demeure pas moins un bon jeu de gestion poids moyen, bien équilibré, donc parfait pour de nouveaux joueurs.
Les joueurs aguerris en manque de sensations, quant à eux passeront leur chemin pour ne pas être déçus.

Note :Si vous souhaitez en savoir plus sur la genèse du jeu (qui était au départ un jeu de cordonniers de Saint James Street)), je vous invite à parcourir ce petit article de Filosofia qui fait suite à une publication de l'auteur Stefan Malz sur BoardGameGeek (en anglais).

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